Christina Battle

Sur les réseaux sociaux, on déplore souvent que la décennie actuelle nous voie nous enfoncer dans un bourbier planétaire et céder à une économie sociale précaire fondée sur la mort, la destruction et la dévastation. Pour contrer les sombres perspectives de la pandémie, de la guerre et des ravages environnementaux, certain·e·s se tournent vers les modes de survie que sont la communion, la guérison et la résistance. Avec Remedy Toxic Energies: Summoning Circle (2022), Christina Battle invitait les gens à participer à des cercles d’invocation afin de résister aux énergies extractrices au c&oelig;ur de l’éthos économique et culturel de l’Alberta. À la première pleine lune de l’année, le 17 janvier 2022, qui était également l’anniversaire de naissance de Martin Luther King, Battle a distribué des trousses d’invocation comprenant de la tisane à la camomille (à boire et à sentir), des chandelles en cire d’abeille (à allumer), un sachet de semences (à semer au printemps) et d’autres instructions. Entremêlant concepts nouvel âge et médecine traditionnelle, correspondance papier et instantanéité d’Internet, son &oelig;uvre se déploie pour cultiver des réseaux de soin et de militantisme. Si Internet a une réputation de réservoir virtuel de grossièretés, de trolls et de désinformation, il peut également porter en germe des croyances spirituelles saines et des échanges interpersonnels propices à la guérison. Dans heavy times / try to remember what it is that you need (2021), Battle transforme deux vidéos de la série Notes to Self (2020-) en chandelles de cire de carnaúba faites main et en boites d’allumettes. Si les brèves vidéos de Notes to Self saisissent de simples interactions répétitives avec les notifications des réseaux sociaux, heavy times fait de ces séquences éphémères des objets concrets. Chaque chandelle rouge, bleue, orange ou verte porte l’inscription « HEAVY » ou « TIMES », de manière à convertir la vogue des chandelles parfumées couteuses en acte de contemplation du moment présent. Plutôt que d’évoquer une transcendance ou une évasion sensorielle, l’&oelig;uvre nous enjoint d’affronter ce présent difficile et de l’éprouver sans relâche. Ces objets n’ont rien de mystique ou de métaphysique : ils nous incitent plutôt à « nous rappeler ce dont nous avons besoin », et non ce que les tendances consuméristes, le capitalisme ou les influenceurs et influenceuses nous conditionnent à vouloir, à désirer et à convoiter. Traduit de l’anglais par Luba Markovskaia Christina BattleNotes to Self, capture d’écran, depuis 2014.Photo : permission de l’artiste Christina BattleNotes to Self, capture d’écran, depuis 2014.Photo : permission de l’artiste Christina Battle, Didier Morelli

Christina Battle

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