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Betye Saar Vanity, 2009.
Photo : Robert Wedemeyer, permission de l'artiste & Roberts Projects, Los Angeles

Tout au long de sa carrière, l’artiste afro-américaine Betye Saar a élaboré une esthétique profondément singulière et personnelle qui transcende la définition stricte des genres en histoire de l’art. En déclinant à sa manière ses premières influences surréalistes, notamment des artistes comme Joseph Cornell, Saar s’adonne à la peinture, au collage, à la sculpture et à l’assemblage de façon à tracer, à partir de son vécu, les contours d’une cosmologie réenchantée destinée à notre époque. Pour y parvenir, elle résiste farouchement aux métarécits patriarcaux blancs sur l’abstraction spirituelle qui, dans les années 1930 et 1940, ont dissocié matérialité corruptible et rigueur utopiste esthétique, ce dont témoignent par exemple les œuvres de Piet Mondrian et de László Moholy-Nagy. L’esthétique de Saar ne vise pas la perfection, car le monde dans lequel elle s’inscrit est loin d’être parfait. Les objets trouvés, les prémonitions occultes, les rituels chamaniques et les présences surnaturelles signalent des enchevêtrements terrestres et célestes souvent imperceptibles que la science nous apprend à dénigrer comme autant de fumisteries médiévales. Saar met au jour les facettes fondamentales de l’existence humaine qui sont reléguées aux marges du langage institutionnel. Son intérêt pour le surnaturel en art n’est pas l’objet de son travail, mais bien la forme à travers laquelle elle exprime son désir irrépressible de dépasser l’appauvrissement culturel et l’exclusion violente dans un monde rempli de haine, de discrimination et de racisme. « Je crée mon art en silence, déclare-t-elle. Les matériaux appellent des idées. Les idées appellent des images. Les images appellent l’art. L’art appelle des sentiments. Les sentiments sont l’objectif visé. »

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Cet article parait également dans le numéro 105 - Nouveau nouvel âge
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