
Le mimosa pudique replie ses feuilles au moindre contact. Le chat se hérisse quand on l’intimide. La chenille du lépidoptère se pare de couleurs voyantes pour avertir les éventuels prédateurs et les faire déguerpir. Pour attirer des partenaires, l’araignée sauteuse fait une danse accompagnée de sons. Semblablement, les encres thermochromiques changent de couleur et les alliages à mémoire de forme se métamorphosent en fonction de la température de leur environnement. Ainsi s’expriment les matériaux biologiques et non biologiques quand la forme, la matière et le comportement sont intimement couplés. Le rapport entre la forme (morphê) et la matière (hylê) est au cœur de l’art et du design. Cela dit, dans la démarche de création, la forme a souvent le dessus sur la matière. D’après l’hylémorphisme, philosophie dominante développée par Aristote, la matière est subordonnée à la forme. D’après la morphogénétique, modèle avancé par Gilles Deleuze et Félix Guattari, toutefois, le processus doit primer sur la représentation. Dans cette logique, la matière a la possibilité de s’exprimer et la forme, après reconsidération, résulte de l’action de forces matérielles. En examinant le rôle de l’expressivité matérielle dans des systèmes vivants et non vivants, j’entends traiter de l’intégration de matériaux actifs dans les pratiques artistiques et de design.