Sortir le travail de sa nuit

Camille Paulhan
Centre de création contemporaine Olivier Debré, Tours
du 16 février au 1er septembre 2024
Sortir le travail de sa nuit
Vue d'exposition, 2014.
Photo : Aurélien Mole, permission du Centre de création contemporaine Olivier Debré, Tours
Centre de création contemporaine Olivier Debré, Tours
du 16 février au 1er septembre 2024
[In French]

Un peu plus de deux ans après une première exposition, Variables d’épanouissement, les commissaires Delphine Masson et Marine Rochard poursuivent leur réflexion sur le travail. Après s’être intéressées à la redéfinition de l’emploi, incarnée notamment par la période liée à la pandémie de COVID-19, elles se penchent ici sur les formes d’invisibilisation des êtres humains derrière certains métiers ou activités non pensées comme relevant du « travail ». Loin de chercher à produire une exposition didactique, dont les œuvres viendraient illustrer un propos prémâché par les sciences humaines, elles ont plutôt souhaité présenter des propositions diverses en empruntant à des époques et à des médiums différents, propositions dans lesquelles la question du travail apparait comme un impensé à révéler.

Sans surprise, la part belle est donnée à des œuvres reposant sur des témoignages, qu’ils soient bruts, réécrits ou fictionnalisés dans des vidéos. Pensons par exemple à Clickworkers (2017) de Martin Le Chevallier, portraits imaginaires de travailleuses du clic disséminées sur plusieurs continents et affectées à des tâches répétitives et absurdes, qui fait écho aux récits glaçants de l’installation Technologies of Care (2016) d’Elisa Giardina Papa, où la parole est donnée à des travailleurs et travailleuses proposant des « prestations émotionnelles » sur Internet, comme alimenter des relations amoureuses sur des sites de rencontre. Les visages et les corps s’effacent au profit de voix originelles, comme dans le film The Seaman (2012) de Bouchra Khalili, où un matelot philippin témoigne avec une clairvoyance froide de son travail sur un porte-conteneurs : « Comment ne pas s’endurcir quand [la cargaison] représente des millions de dollars ? » demande-t-il sans animosité, tout en évoquant sa condition d’homme nécessairement isolé, qui se déplace de port en port sans pour autant voyager.

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This article also appears in the issue 111 - Tourism
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