BGL, Spectacles + Problèmes

Marie-Eve Beaupré
MAC/VAL, Val-de-Marne,
du 22 octobre au 31 décembre 2011
[In French]

Entre la perception d’un grand bûcher de l’ère moderne et celle d’un immense bricolage dont la maladresse lui confère une poésie certaine, la plus récente installation de BGL, intitulée Spectacles + Problèmes, bascule toutes les trois minutes. Jasmin Bilodeau (B), Sébastien Giguère (G) et Nicolas Laverdière (L) ont, pour ce faire, usé d’un subterfuge qui relève du clair-obscur. Il faut savoir que le projet fut développé pour l’événement Nuit Blanche 2011 et inauguré dans le gymnase Ronsard à Paris. Le Musée d’art contemporain de Val-de-Marne eut l’excellente idée d’inviter le collectif de sculpteurs québécois à rejouer son impo-sante installation dans le vaste espace de sa nef, un lieu qui se prête parfaitement à sa présentation. 

Somme toute, le projet est primitif. Une salle obscure. En son centre, un amas de branches mortes, sur lesquelles sont attachées des flammes factices faites de rubans colorés, sous lesquelles sont disséminés de petits morceaux de plastique imitant des braises rouges, oranges, jaunes et quelques ventilateurs. Ainsi, les flammes dansent au gré de la circu-lation de l’air et à l’extrémité de ce grand brasier, une branche d’arbre feuillue tournoie comme une ballerine sur ses pointes. Ce spectaculaire foyer et la réverbération de ses ombres au plafond procurent au regard un indéniable plaisir. Toutefois, trois minutes plus tard advient l’acte du « drame de lumière ». Soudainement, la salle s’éclaire, la fête se termine, la magie s’évanouit, l’espace devient même ennuyant.

BGL a comme pratique récurrente de dévoiler l’envers du décor, les ficelles de l’artifice. Adepte de la récupération, le collectif fabrique avec des techniques et des matériaux bruts des installations qui, d’une lucidité implacable, éclairent divers malaises liés au monde de la consommation. L’image crue de cet amas de bois presque entièrement en flammes ouvre sur une réflexion qui concerne notre relation avec l’environnement social autant qu’avec l’environnement naturel. Le bûcher des vanités est notamment évoqué. Bien que cette oeuvre comporte une critique sociale incisive, elle n’en demeure pas moins plus près de la poésie que du discours. Il faut y voir une métaphore qui suscite à la fois émerveillement et malaise ; il faut y entendre un commentaire social éloquent ; il faut aussi y voir une conception qui, à l’image du romantisme, place la nature au-dessus de l’homme. 

BGL, Marie-Eve Beaupré
This article also appears in the issue 74 - Reskilling
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