Auguste Clintberg (Mark Clintberg)
Portal 2

Itay Sapir
Pierre-François Ouellette art contemporain, Montréal
du 11 septembre au 16 octobre 2021
Auguste Clintberg (Mark Clintberg)Portal 2, vue d'exposition, 2021.
Photo : Paul Litherland, permission de l'artiste et de PFOAC, Montréal
Pierre-François Ouellette art contemporain, Montréal
du 11 septembre au 16 octobre 2021
[In French]

De prime abord, Portal 2 semble correspondre à deux ­tendances courantes dans l’art actuel : d’un côté, l’assise autobiographique (l’exposition aurait comme point de départ l’expérience vécue de l’artiste) et, de l’autre, une quête de justice sociale, en particulier pour des groupes historiquement et présentement marginalisés et discriminés (ce serait ici une expression des luttes LGBTQ). Or, il s’avère que les choses sont bien plus complexes et ambigües, ce qui rend l’installation de Auguste Clintberg (Mark Clintberg) véritablement originale. 

L’autobiographie, d’abord, se retourne comme un gant, puisque ce que nous raconte l’artiste, c’est précisément le non-vécu : ce qui aurait pu, ou aurait dû, être vécu mais qui ne l’a pas été. L’exposition tourne autour d’un incident ayant eu lieu en 1979 dans le Central Memorial Park de Moh’kinsstis (connue aujourd’hui comme Calgary) alors que l’artiste était un très jeune enfant vivant lui-même en Alberta (le lieu précis se trouve près de son domicile actuel). Ce jour de 1979, « un homme faisant des avances homophobes et violentes a été attaqué et tué par deux hommes-qui-ont-du-sexe-avec-des-hommes qui se promenaient », raconte le texte écrit par l’artiste. Ce n’est que bien plus tard que Clintberg a entendu parler de l’évènement et que celui-ci a marqué sa vie. Et si ce qui s’est passé a à voir, en effet, avec la lutte contre la violence faite aux personnes LGBTQ, la nature de l’incident brouille les frontières entre bourreaux et victimes, entre celles et ceux qui détiennent le pouvoir et celles et ceux qui sont relégué·e·s dans les marges. Pour une personne LGBTQ (comme l’artiste, comme l’auteur de ces lignes), la réaction à ce retournement de situation – deux gais tuant un hétéro – est imprévisible et éthiquement ambigüe : doit-on se réjouir de la mort d’un homme, même s’il est violent, agresseur et homophobe ? Ce meurtre est-il potentiellement une source de fierté et d’empowerment ou, au contraire, comme le suggère également l’artiste, de honte et d’anxiété ?

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This article also appears in the issue 104 - Collectives
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