Degrés d’hybridité. Regard sur le Mois Multi 6

Pierre Rannou
Degrés d’hybridité. Regard sur le Mois Multi 6, Québec, OHM éditions/Avatar, 2005, 87 p.

[In French]

Le Mois Multi apparaît de plus en plus comme une plaque tournante importante pour la diffusion des réflexions sur le croisement des disciplines artistiques. Il n’est donc pas étonnant que ses organisateurs aient décidé de publier un catalogue afin de permettre la conservation d’une mémoire de l’événement. Ce catalogue de l’édition 2005, lancé lors de la tenue de l’événement de cette année, est entièrement bilingue, ce qui témoigne clairement d’un désir de promouvoir et de diffuser l’événement à l’extérieur du Québec.

Après une présentation de l’événement et de la formule du Mois Multi, le catalogue s’ouvre sur le texte d’Alain-Martin Richard intitulé « Hybridation ou la bête chimérique ». La première partie de ce texte est constituée d’une description commentée des différentes propositions, où apparaissent ici et là de petites remarques critiques, alors que la seconde se présente comme une réflexion plus générale sur les enjeux soulevés par les diverses prestations. Pourtant, contrairement à ce que l’on pourrait penser, Richard insiste tout particulièrement sur le rapport du spectateur aux nouvelles technologies plutôt qu’à leurs impacts sur la création. Ainsi, il affirme que « le développement des machines et leur usage dans le projet artistique nous offrent des expériences esthétiques nouvelles qui permettent de constater la capacité du spectateur à élargir ses motifs conceptuels. » Plus loin, il explique que la narration induite par le travail avec ces technologies «modifie […] les codes narratifs », précisant, à partir de 3 œuvres présentées lors de la tenue de l’événement, que « cette narration en abîme […] fait plutôt appel à une capacité de compréhension qui serait en porte-à-faux sur le fil de la raison et de l’émotion ». Il apparaît nettement que, pour lui, « dans le rapport aux technologies numériques, il semblerait que ce soit la qualité des perceptions qui soit directement concernée ». 

Le reste de l’ouvrage prend la forme plus traditionnelle du catalogue, et l’on y retrouve les intentions des participants quant aux différents projets, les informations sur la participation de chacun et les biographies des individus ou des collectifs. La publication est accompagnée d’un DVD sur lequel on retrouve un entretien avec le directeur artistique du Mois Multi, Émile Morin, qui explique l’importance de l’événement, son développement à venir et la place grandissante que l’on veut accorder aux installations d’arts électroniques. De plus, chacun des artistes ou des collectifs de l’édition 2005 a droit à une capsule vidéo, dans laquelle ils expliquent leur démarche et leurs intentions. Des extraits des prestations sont aussi inclus sur le DVD, ce qui permet de voir la construction de la représentation dans le temps – ce que ne permet pas l’image fixe – et, dans certains cas, d’expérimenter un peu le dispositif utilisé, comme par exemple pour Audiomobile de Matt Smith et Sandra Winter. Soulignons enfin que le graphisme de la publication, à la fois inventif et extrêmement efficace dans sa mise en valeur des informations, rend la consultation du document très agréable, ce qui est un atout important pour un ouvrage de la sorte. 

Pierre Rannou
This article also appears in the issue 58 - Extimité ou le désir de s’exposer
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