Corey Bulpitt & Larissa Healey, Brian Jungen Beat Nation: Art, Hip Hop and Aboriginal Culture, vue d’installation, Vancouver Art Gallery, 2012.
Photo : Rachel Topham, Vancouver Art Gallery

Voix indigènes et pédagogie des Blancs

Maeve Hanna
Se faire couturière
Recoudre ensemble
Une œuvre à la fois
Un nom à la fois
Une voix à la fois1 1 - Moe Clark, « Butterfly Ashes », Fire and Sage, Bruxelles, maelstrÖm rEvolution, 2013, p. 16.

La voix délicate d’Edie Frederick résonne dans la salle d’exposition. L’ainée de la communauté des Lheidli T’enneh accueille les visiteurs en dakelh (qui se prononce da‑keth), langue des Porteurs, une Première nation établie dans la région centre-­nord de la Colombie-Britannique. Elle traduit ensuite : elle est descendante de Six Mile Mary, chef du Clan des tétras des Lheidli T’enneh, une femme renommée pour ses pêches au corégone au lac Six Mile (aujourd’hui appelé lac Tabor), qui parcourait les rivières dans sa pirogue2 2 - Conversation avec Edie Frederick, 4 mai 2015.. Robert Frederick, mari d’Edie et lui aussi ainé Lheidli T’enneh, prend ensuite la parole. Il raconte le jour où sa grand-mère a croisé le tout premier Blanc à Prince George. Robert marque une pause, tente de contenir son émotion, puis il parle de son séjour au pensionnat. Tous se taisent, abasourdis ; ils écoutent l’homme raconter sans détour les expériences atroces, inimaginables que lui ont fait subir les Blancs. En regardant autour de moi, je vois beaucoup de gens que je connais, dont un grand nombre sont des descendants de colons. Robert Frederick poursuit son récit ; il raconte la légende du saumon gravé sur le canot en peuplier autour duquel les visiteurs se sont rassemblés. L’embarcation est l’œuvre d’étudiants inscrits au programme d’études autochtones de l’Université de Northern British Columbia ; ils l’ont sculptée avec l’aide de Robert Frederick dans le cadre d’un cours. Robert leur a montré comment la construire en suivant la tradition. Il a gravé la légende du saumon sur un côté et les étudiants l’ont imité sur l’autre, apprenant ainsi les légendes des Lheidli T’enneh tout en s’initiant à l’art traditionnel de la sculpture auprès d’un maitre-artisan.

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Cet article parait également dans le numéro 85 - Prendre position
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