Tsai-Ming-liang_Walker
Tsai Ming-liangWalker, capture vidéo, 2012.
Photo : permission de l’artiste

Visites à pied avec Tsai Ming-liang

Adam Abouaccar
Amelia Wong-Mersereau
Depuis 12 ans, le personnage du « marcheur » du réalisateur taïwanais Tsai Ming-liang parcourt le monde à pied. Les neuf films de la série, en cours, partagent tous la même prémisse : un moine anonyme vêtu d’habits rouge éclatant, interprété par Lee Kang-sheng, muse de longue date de Tsai, marche très lentement d’un endroit à un autre. Avançant toujours, sans jamais se faire interrompre ou presque, il traverse Taipei, Hong Kong, Marseille, Tokyo et, plus récemment, Paris. Progressivement, la durée des films de la série Walker augmente. No Form, le premier des quatre films ­sortis en 2012, dure 20 minutes, tandis que le 10e et dernier volet, Abiding Nowhere (2024), est un long métrage de 79 minutes. Le parcours de Lee dans ces villes est présenté dans un style étonnamment simple et minimaliste. Montée sur un trépied, la caméra est statique. Ce sont nos yeux qui suivent le mouvement du personnage d’un bout à l’autre de l’image. Les muscles de son corps se tendent, se figent et se relâchent doucement pendant qu’il se déplace à ce rythme plus que lent.

Presque tous les films de la série ont été produits à l’invitation d’un festival ou d’un organisme local. Pourtant, même s’il relève de la commande, le projet semble n’être ni influencé ni compromis : tout changement perceptible d’un film à l’autre est moins lié aux exigences du commanditaire de chaque volet qu’à l’évolution des intérêts et des objectifs de Tsai. Nous retrouvons fréquemment le marcheur dans des rues secondaires modestes, dans des passages souterrains ou à des arrêts d’autobus. Un festival ou un office de tourisme désirant augmenter sa visibilité ou sa fréquentation ne demanderait pas à un·e cinéaste de renom de mettre en valeur ces types de lieux. Cependant, les films de Tsai font la promotion de leur propre genre de tourisme, un tourisme en retrait des rythmes de la vie contemporaine, voire en opposition totale avec ceux-ci.

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Cet article parait également dans le numéro 111 - Tourisme
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