Vincent Larouche Sandcastle Staircase, vue d’exposition | exhibition view, Ryan LLC, Montréal, 2018.
Photo : Dante Guthrie, permission de l’artiste | courtesy of the artist

Peindre dans un monde transitoire : Vincent Larouche et les effets de la culture numérique

Cindy Hill
Internet a transformé la peinture. Aujourd’hui, plus que jamais, les peintres et leurs œuvres sont parties prenantes d’un réseau non hiérarchique, parmi d’autres artistes, faits historiques, images, informations, recettes de pain de viande, animés pornographiques, fils de discussion Reddit sur la science-fiction des années 1990, mèmes sur l’arôme de tarte à la citrouille et sites tels que WebMD. Ce contenu peut être transposé de l’écran à la toile, et vice versa, grâce à la capacité des artistes à y accéder, à le modifier, à le reproduire et à le publier en ligne en tant qu’acte pictural. Un tel processus cyclique produit de nouveaux sens et élargit le champ de la peinture pour l’ouvrir à ce que David Jose- lit appelle l’«extériorisation » picturale, qu’il décrit comme « une extension de sa définition, qui passe de l’apposition de marques sur la toile à une forme de marquage de l’espace physique »1 1 - David Joselit, « Marking, Scoring, Storing, and Speculating (on Time)», dans Isabelle Graw et Ewa Lajer-Burcharth (dir.), Painting beyond Itself: The Medium in the Post-medium Condition, Berlin, Sternberg Press, 2016, p. 17. [Trad. libre]. Dans cet esprit, l’évocation de contenu numérique en tant qu’acte pictural a pour effet de marquer l’espace physique en dirigeant l’attention du spectateur vers ce contenu telle une forme matérielle sur la toile.

Par ces actions, le contenu virtuel se manifeste dans le monde physique et la peinture devient un écran externe2 2 - Achim Hochdörfer, « How the World Came In», dans Manuela Ammer, Achim Hochdörfer et David Joselit (dir.), Painting 2.0: Expression in the Information Age: Gesture and Spectacle, Eccentric Figuration, Social Networks, Munich, Museum Brandhorst, 2015, p. 24., conservant une trace de l’historique de recherche de l’artiste grâce aux images, aux gestes et aux formes qu’il s’approprie. Les langages numérique et analogique deviennent ainsi étroitement liés.3 3 - Ibid. Dans la démarche de l’artiste montréalais Vincent Larouche, la peinture se comprend comme une transposition qui nous fait prendre conscience que la notion hégémonique de connaissance a changé en raison de notre façon de consommer les images en ligne. À travers son œuvre, Larouche explore la capacité d’Internet à altérer la perception de la réalité, l’empathie et la sécurité en faisant passer l’imposant monde virtuel dans le monde matériel. Il nous rappelle que dans cet espace de connectivité globale, personne ne peut réellement savoir qui a le contrôle.

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Cet article parait également dans le numéro 102 - (Re)voir la peinture
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