Carte blanche à Kimsooja

Julie Richard
Bourse de Commerce – Pinault Collection, Paris
du 20 mars au 2 septembre 2024
Kimsooja
KimsoojaTo Breathe – Constellation, vue d’installation, 2024.
© Kimsooja / ADAGP, Paris / CARCC, Ottawa (2024)
Photo : Florent Michel / 11h45, permission de Pinault Collection, Paris
Bourse de Commerce – Pinault Collection, Paris
du 20 mars au 2 septembre 2024
[In French]

Apologie du vide, l’installation To Breathe – Constellation (2024), de l’artiste coréenne Kimsooja, introduit la carte blanche que lui donne la Collection Pinault, à la Bourse de Commerce. Logée sous la coupole emblématique, l’œuvre immersive faite entièrement de miroirs reflète l’immense fresque du 19e siècle illustrant le commerce de la France avec les autres continents. Du souhait de sa créatrice, faire l’expérience de son minimalisme revient à bousculer les repères spatiaux et à resserrer les limites entre soi, l’autre et l’infiniment grand. Misant sur son effet spectaculaire, l’installation, qui provient d’une série d’œuvres in situ signatures – notamment réalisées à Toronto ou à Paris –, ne se révèle cependant pas la plus éloquente de la sélection de la commissaire Emma Lavigne.

La mise en vitrine d’objets hétéroclites (usuels ou créés de toutes pièces) autour de la rotonde centrale, elle plus convaincante, nous initie en effet de belle façon à la pratique de Kimsooja. Ainsi, des artéfacts épars dans des micro-espaces clos reprennent les thèmes qui lui sont chers, tels la présence intangible, l’immatérialité, le nomadisme et l’éphémère. Ils adoptent des formes mues par la trace gestuelle de l’artiste, dont des papiers froissés, des billes de porcelaine, de la glaise, le dépôt de grains de sable et de lin, ou encore des formes rondes épousant celle des bottari, ces baluchons colorés associés à des cultures asiatiques nomades et construits à partir d’enveloppes textiles. La vidéo Sewing into Walking – Kyungju (1994), issue de sa première performance filmée et diffusée au sous-sol du musée aux côtés de cinq bottari (Bottari, 2017), montre d’ailleurs, dans un montage au ralenti, la récupération rituelle de tissus ancestraux par la performeuse. L’aspect organique du symbole et sa métaphore
corporelle frappent : ils rappellent le mouvement des personnes migrantes ou encore le linceul recouvrant la dépouille une fois la mort venue et révèlent de surcroit le tissage non pas en tant qu’objet, mais plutôt comme liant social et élément de continuité rituel à travers les âges.

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Esse 113 Plastiques - Plastics : Couverture arrière
This article also appears in the issue 113 - Plastics
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