Martha Rosler
Meta-Monumental Garage Sale

Ariane Daoust
MoMA, New York
du 17 au 30 novembre 2012
Martha RoslerMeta-Monumental Garage Sale, vue d'installation, The Museum of Modern Art, New York, 2012.
Photo : Scott Rudd
MoMA, New York
du 17 au 30 novembre 2012
Pour sa première exposition individuelle au MoMA, Martha Rosler est invitée par la commissaire Sabine Breitwieser à recomposer Meta-Monumental Garage Sale. Cette installation-performance est une des diverses versions de Garage Sale initialement présentée à la galerie de l’Université de Californie à San Diego en 1973, contexte hautement politisé des mouvements féministes.

Rosler, originaire de Brooklyn, s’installe sur la côte ouest au début des années 70 où elle expérimente pour la première fois les ventes de garage. D’abord choquée, car à New York les gens donnaient simplement les choses dont ils voulaient se débarrasser en les déposant dans la rue, Rosler comprend ensuite qu’il s’agissait d’une vraie économie parallèle. Elle conçoit alors sa propre vente signalée à la fois dans un journal local en tant que simple garage sale, et comme événement artistique dans le monde de l’art. De la même manière, l’installation au MoMA est une véritable vente de garage où l’on trouve toutes sortes de marchandises d’occasion ou non – vêtements, livres, jouets, meubles, lettres personnelles, stérilets. Les quelque 14 000 articles sont rassemblés grâce aux dons de la collectivité. Durant l’exposition, l’artiste tient boutique et entretient avec les visiteurs-consommateurs des échanges basés sur la transaction d’argent et le marchandage. Ainsi, c’est par la conversation et dans la collectivité que l’« œuvre » se réalise. D’ailleurs, au terme de chacune de ses garage sales, Rosler remet le produit des ventes à une œuvre de charité, ce qui montre bien que l’on peut aussi penser l’art en dehors du musée et comme activité opérant dans le réel.

Ce projet est emblématique du travail de l’artiste qui, dès les années 70, déconstruit les mécanismes de la culture populaire et les vétilles de la vie quotidienne pour poser une réflexion sur la société contemporaine. Rosler interroge les relations de pouvoir et de domination entre les idéologies politiques et les individus. Dans Meta-Monumental Garage Sale, elle porte un regard critique sur le fétichisme de l’objet ainsi que sur l’institution artistique prise comme système comprenant producteurs, marchands, public et collectionneurs. Elle attire également l’attention sur le système d’évaluation en vigueur dans le monde de l’art. À travers les questions de la vie familiale et de la circulation des objets domestiques, Rosler évoque un discours féministe puissant faisant expression de la considération du privé comme politique. L’arène de la vie domestique devient ici le lieu d’une réflexion profonde et intelligente sur l’art, la société et la culture.

Fidèle à sa volonté de subvertir les positions et catégories traditionnelles de l’art, Rosler nous propose avec beaucoup d’humour un art qui peut être traité et manipulé avec une délicieuse insouciance, ce qui est plutôt rare dans le contexte du musée et de la galerie . 

Ariane Daoust, Martha Rosler
Cet article parait également dans le numéro 78 - Danse hybride
Découvrir

Suggestions de lecture