Ai Weiwei, fairytale
Ai WeiweiFairytale, documenta 12, 2007.
Photo : Julia Zimmermann & documenta GmbH, permission Galerie Urs Meile, Pékin & Lucerne, Fondation Leister & Fondation Erlenmyer, Suisse

Le Grand Tour, entre les biennales et l’Ancien Régime

Itay Sapir
En 2007, un site internet alléchant a attiré l’attention des amatrices et amateurs d’art contemporain du monde entier. Le Grand Tour 2007, disait-il, allait nous occuper pendant l’été suivant : « Welcome to the Grand Tour of the 21st Century. » Le site proposait des informations pour organiser une tournée européenne incluant la 52e Biennale de Venise, la documenta 12 de Kassel, la 7e édition de l’évènement décennal Skulptur Projekte de Münster, ainsi que, dans un autre registre, la foire Art Basel. Il est vrai que la coïncidence était rare : compte tenu du rythme de récurrence de chacune de ces expositions, ce genre de voyage n’était possible qu’une fois tous les 10 ans (et, depuis le report de la Biennale de Venise en raison de la pandémie, il ne l’est plus du tout). L’idée de proposer de parcourir ces évènements l’un après l’autre n’était donc guère surprenante, mais le titre choisi pour l’entreprise intriguait. Au-delà du sens littéral, la référence historique était évocatrice, peut-être même provocatrice.

Le Grand Tour, après tout, est un concept historique précis, associé au 18e siècle européen, à ce qu’on appelle souvent encore (avec de plus en plus de précautions) le siècle des Lumières. C’était « un voyage initiatique qui [permettait] aux jeunes gentilshommes anglo-saxons […] d’élargir leurs connaissances des pratiques sociales et politiques des divers États du Continent tout en s’imprégnant de culture classique en Italie1 1 - Pierre Chessex, « Grand Tour », dans Michel Delon (dir.), Dictionnaire européen des Lumières, Paris, Presses universitaires de France, 1997, p. 599. ». Par où commencer à décortiquer cette phrase ? Chacun de ses mots est une bombe à retardement, dans le climat de relecture historiographique d’aujourd’hui ; déjà en 2007 (et plus encore en 2017, quand la presse artistique en parlait de nouveau), le concept n’était pas si innocent que ça.

Cet article est réservé aux visiteur·euses avec un abonnement Numérique ou Premium valide.

Abonnez-vous ou connectez-vous à Esse pour lire la rubrique complète !

S’abonner
Se connecter
Cet article parait également dans le numéro 111 - Tourisme
Découvrir

Suggestions de lecture