Liam-Gillick
Liam GillickA Variability Quantifier (The Fogo Island Red Weather Station), vue d’installation, ile Fogo, 2022.
Photo : permission de l'artiste & Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa

L’artiste en résidence, un·e touriste comme un·e autre ?

Nathalie Desmet
Depuis la mode du Grand Tour en Europe aux 17e et 18e siècles, les artistes ont toujours été encouragé·es à voyager et à se déplacer à la rencontre d’autres cultures. L’offre croissante de résidences artistiques1 1 - Je ne parlerai pas, dans cet article, des résidences de production, qui permettent aux artistes de produire des œuvres par les dispositifs techniques qu’elles offrent, ni des résidences de médiation, dont l’objectif premier est indexé à la démocratisation de la culture. dans des lieux lointains ou extraordinaires témoigne de même de relations toujours plus étroites avec l’idée du tourisme. Être touriste implique d’« habiter des lieux autres que le sien quotidien et cela de façon temporaire2 2 - Giorgia Ceriani, Mathis Stock, Philippe Duhamel et Rémy Knafou, « Le tourisme et la rencontre de l’autre : voyage au pays des idées reçues », L’autre, vol. 6, no 1 (2005), p. 74. » et offre – comme pour l’artiste en résidence – les promesses d’une expérience du temps et de l’espace hors des contingences et des contraintes de la vie habituelle, tout en supposant souvent des déplacements aux impacts environnementaux lourds.

Bien qu’il existe une vaste typologie de résidences artistiques, une directive consistant à favoriser l’inscription des artistes dans un contexte local et social semble s’imposer, notamment pour les résidences dites de recherche, d’expérimentation et de création. Ces dernières invitent implicitement ou explicitement à dialoguer avec l’environnement, voire à résoudre des problèmes, ce qui suppose des interactions de plus en plus soutenues avec l’entourage. En 1996, le critique d’art Hal Foster soulignait les problèmes éthiques découlant de la position et de l’extériorité des artistes qui s’emparent des techniques et des méthodes ethnographiques3 3 - Hal Foster, Le retour du réel : situation actuelle de l’avant-garde, traduit de l’anglais par Yves Cantraine, Frank Perobon et Daniel Vander Gucht, Bruxelles, La lettre volée (Essais), p. 213-247.. Au reproche d’exotisation que l’on peut faire à certain·es touristes pourrait en effet correspondre une forme d’extractivisme social illustré par le développement de relations humaines transitoires, sans suite et sans redistribution, que suscite l’éphémérité des résidences.

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Cet article parait également dans le numéro 111 - Tourisme
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