
Photo : Andrea Rossetti, permission de l’artiste, Galerie Buchholz et Sprüth Magers
du 22 mai au 24 octobre 2021
Faust, la performance magistrale d’Anne Imhof ayant marqué la Biennale de Venise en 2019, a fait que l’exposition Natures mortes était très attendue. L’artiste nous y introduit par un long corridor construit avec de grands panneaux de verre fumé transparents ou opaques, rayés, tagués, provenant de bureaux désaffectés. À l’extérieur, au-delà de notre propre reflet, se laisse apercevoir Finite Infinite de Sturtevant, la vidéo de la course éreintante d’un chien, une photographie de Wolfgang Tillmans présentant un jeune homme ivre mort dormant dans un caniveau ou encore sept peintures de Imhof elle-même, représentant la chute du soleil au crépuscule. Le dispositif procède à la fois du constat de la fin inéluctable d’un monde et d’un appel à fuir. Le sas débouche sur un espace conçu avec Eliza Douglas, son alter ego, dont le travail sonore est capital tant il colore cette carte blanche dans son entièreté, à renfort de nappes, de boucles répétitives, entêtantes et de hurlements. Dans une salle en retrait, la vidéo d’une performance réalisée à la Tate Modern, Sex, permet de retrouver le vocabulaire par lequel Anne Imhof s’est fait connaître : mise en scène de jeunes urbains désabusés, fascinants de morgue et de froideur, dont on suit les affrontements ou les rapprochements sans vraiment en saisir les motivations. Telle une introduction synthétique, tous ces éléments créent un terreau fertile pour la suite de la proposition.

Untitled, 300 × 190 cm, 2017.
Photo : Aurélien Mole, permission de l’artiste et Galerie Buchholz

Untitled (Imagine), 25 × 31 × 25 cm, 2019.
Photo : Aurélien Mole, permission de l’artiste et Galerie Buchholz
Anne Imhof a entièrement vidé de ses cimaises l’espace principal du Palais de Tokyo et a recréé d’autres cloisons avec ces mêmes parois semi opaques miroitantes : des boxes dans lesquels des objets abandonnés – enceintes, micros, guitares ou matelas blancs immaculés – voisinent avec les œuvres de Sigmar Polke, Alvin Baltrop, Bunny Rogers, Mohamed Bourouissa… ou encore des écorchés de Géricault. Les paysages de ruines cohabitent avec la violence latente contenue dans certaines œuvres comme celle de Klara Lindén filmée en train d’ajuster ses mouvements pour détruire une bicyclette avec une barre de fer. Les structures coercitives nous affectent, on s’attend à voir surgir des performeurs, on les cherche sur les promontoires métalliques, structures récurrentes chez Imhof, caractéristiques d’un panoptique servant à s’organiser en sentinelles. Ceux-ci pourraient également nous inciter à prendre de la hauteur pour parer à d’éventuelles menaces.
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