Paul Poet
My Talk with Florence

Vanessa Morisset
FIDMarseille 2015, 26e Festival international de cinéma de Marseille, programmation Écrans parallèles, Histoires de portraits
(première projection internationale)
du 30 juin au 6 juillet 2015
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Paul Poet Images tirées du documentaire My Talk with Florence, 2015, 129 min.
Photo  : © Paul Poet
[In French]
Regarder My Talk with Florence, c’est entrer dans l’intimité d’une conversation dont on devine assez vite qu’elle a commencé avant le film et qu’elle se poursuivra après. Mais c’est aussi, en suivant le parcours d’une vie très accidentée à travers la France et l’Autriche, retracer un pan de l’histoire européenne de ces cinquante dernières années : une histoire vécue et racontée par une femme, bien différente de l’histoire officielle. Le récit de Florence offre en effet un autre point de vue que celui d’une Europe en reconstruction, dans l’euphorie des Trente Glorieuses. C’est bien plutôt une société qui révèle de noires facettes.

Dès les premières minutes du film, le contraste entre le minimalisme apparent du dispositif – un entretien entre le réalisateur et son interlocutrice, filmé presque toujours en plan fixe, dans un intérieur quelconque – et la complexité de ce qui va être énoncé se fait sentir. Enregistré pendant plus de deux heures, avec seulement une coupure centrale pour faire une pause, le dialogue a été préparé au préalable, afin que la parole puisse advenir, clairement et sans pathos. En cela le documentaire se rapproche du théâtre filmé : un style dépouillé au service d’un corps qui parle. Comme pour se mettre en scène, Florence commence par prendre dans ses bras une poupée aux mains coupées et au visage souillé, qu’elle dit avoir trouvée dans la rue et soignée. Elle la tiendra contre elle comme un bébé tout au long du film. La caméra zoome sur cet objet à la fois attendrissant et terrifiant qui s’annonce comme une métaphore. Puis Florence raconte très précisément comment elle a été abusée physiquement et mentalement à de nombreuses reprises dans sa vie. D’abord violée par son grand-père dans une famille bourgeoise française, elle l’a été aussi d’une certaine manière par son entourage et les institutions qui ne lui ont pas prêté secours, bien au contraire. Ensuite, après des années d’internement en hôpital psychiatrique à la demande de ses parents, puis de fuite et de vagabondage, elle croit trouver refuge dans une communauté alternative. C’est ainsi qu’elle se retrouve dans celle de Friedrichshof, fondée au début des années 1970, près de Vienne, par l’artiste actionniste Otto Mühl, qui s’avère s’être transformée en une organisation sectaire fascisante.

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This article also appears in the issue 86 – Geopolitics - Geopolitics
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