RÉELLES FICTIONS / REAL FICTIONS
du 12 septembre au 7 décembre 2024

Vue d'exposition, Centre SKOL, Montréal, 2024.
Photo : William Sabourin, permission du Centre SKOL, Montréal
du 12 septembre au 7 décembre 2024
Avec l’exposition RÉELLES FICTIONS / REAL FICTIONS, le Centre des arts actuels SKOL offre une réflexion essentielle, aussi conceptuelle que sensible, sur la nuit… Ou plus précisément, dans la nuit, puisque les commissaires (Manolis Daris-Becotte, Adrien Guillet, Clara Lacasse et Florent To Lay) ont pris le parti de plonger tout l’espace du white-cube dans la noirceur. Un geste commissarial puissant qui, à la croisée du poétique et du politique, tient de l’inversion scénographique, suggérant ainsi de renverser la positivité de la norme : l’espace-temps de la nuit se dérobant à la colonisation capitaliste et productiviste de nos territoires temporels, l’opacité nocturne comme condition d’une perception alternative, l’absence de lumière comme brèche ouverte sur un sentir total éclairant la raison.
Dans cet espace du « black-cube », les œuvres des cinq artistes invité·es dialoguent à travers une multiplicité de fils interprétatifs : un diptyque de textile imprimé et brodé de breloques d’Aurélie Blanchette Dubois (The Moistest Shade of Thou I & III, 2023) marque le seuil que l’on franchit pour passer d’une section à l’autre de la salle. Apparaissant de prime abord comme un simple rideau nous rappelant au confinement (rassurant ? étrange ?) de nos intérieurs domestiques, s’y dévoile, de plus près, toute la multitude de détails isolés (suspensions, tuyaux, jets d’eau, mains humaines) qui, répétés et assemblés numériquement, constituent la trame ornementale de ce qui s’apparente à un vitrail de tissu. Œuvre métonymique du dispositif scotopique déployé dans l’exposition, ce rideau cristallise effectivement un travail particulier de mise en condition du regard. Il permet d’activer le regard, d’expérimenter sa mobilité et d’en révéler son instabilité, dès lors que les conditions d’un regard « objectif » autant qu’objectivant1 1 - Je renvoie à Édouard Glissant (Poétique de la relation, pp. 203-209) sur les potentialités bienfaitrices d’une pensée fondée sur le paradigme de l’opacité (plutôt que de la transparence), soubassement d’une poétique de la relation plutôt que de la domination. sont abolies du fait de l’indétermination catalysée par l’opacité libératrice de la pénombre. « L’opaque n’est pas l’obscur »,2 2 - Ibid., p. 205. enseigne l’écrivain Édouard Glissant.
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