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Francis Alÿs (en collaboration avec Julien Devaux & Ajmal Maiwandi) REEL-UNREEL, capture vidéo , 2011.
Photo : permission de David Zwirner, New York/London

Reel-Unreel de Francis Alÿs

Séverine Cauchy
Dans l’œuvre Reel-Unreel 1 1 - Francis Alÿs, Reel-Unreel, Kaboul, 2011, 19 min 29 s, www.francisalys.com/public/reel-unreel.html [consulté le 28 mars 2015]. Vidéo produite en collaboration avec le réalisateur Julien Devaux et l’architecte afghan Ajmal Maiwandi dans le cadre de la documenta (13), manifestation quinquennale d’art contemporain qui s’est déroulée du 9 juin au 16 septembre 2012 à Kassel, en Allemagne. , de Francis Alÿs, les cerceaux que les enfants afghans font rouler et dirigent à l’aide d’un bâton ont été troqués pour des bobines métalliques de cinéma qu’ils poussent du plat de la main et font avancer par frictions répétées.

Deux enfants courent l’un devant l’autre. Le premier pousse une bobine métallique rouge chargée d’une pellicule. Sous l’effet de la course de l’enfant et de la poussée qu’il exerce de sa main, la pellicule se dévide de son magasin circulaire pour être récupérée par un second garçon, dont la bobine bleue se charge progressivement du film qu’il rembobine tout en poursuivant sa course. Une première action − le déroulé du film de la bobine rouge − a un lien direct avec cette seconde action – le chargement et l’enroulement du film sur la bobine bleue –, dans un double mouvement de rotation inversée et simultanée. Les deux enfants afghans courent, dévalant les reliefs escarpés, les escaliers, les ruelles, les marchés et les routes encombrés : la vie de Kaboul. À la fin de cette joyeuse cavalcade haletante dont le souffle se fait de plus en plus entendre, les évènements s’accélèrent. La pellicule se rompt, brulée par un feu qui se trouve sur son passage. La bobine rouge fait une sortie de route ; projetée à grande vitesse sur les talus escarpés, elle est précipitée, de bonds en rebonds, dans les contrebas de la colline, où elle finit par disparaitre. La bobine bleue ne rembobine plus, ne roule plus sur le sol : l’enfant la tient dans ses mains et, à la hauteur de ses yeux, la fait tourner à vide quelques instants. Dominant Kaboul, le jeune Afghan esquisse un sourire. C’est sur cette scène qu’Alÿs interrompt le déroulement de l’histoire pour faire défiler quelques phrases sur le fond noir d’un arrière-plan sans images : « Le 5 septembre 2001, les talibans confisquèrent des milliers de bobines de films des Archives du film afghan et les brulèrent en périphérie de Kaboul. On raconte que l’incendie dura 15 jours. Mais les talibans ne savaient pas qu’on leur avait surtout donné des copies de film pouvant être remplacées, plutôt que les négatifs originaux, irremplaçables2 2 - Ibid., 16 min 29 s. [Trad. libre]. »

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Cet article parait également dans le numéro 85 - Prendre position
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