Isabelle Alfonsi

Pour une esthétique de l’émancipation

Camille Paulhan
Éditions B42 Paris, 2019, 160 p.
Isabelle Alfonsi Pour une esthétique de l’émancipation, pages intérieures et couverture, 2019.
Photos : permission des Éditions B42
Éditions B42 Paris, 2019, 160 p.
Isabelle Alfonsi
Pour une esthétique de l’émancipation, pages intérieures et couverture, 2019.
Photos : permission des Éditions B42
[In french]
Isabelle Alfonsi signe cette année un essai au titre singulièrement prometteur. Son « esthétique de l’émancipation », explique-t-elle dans l’introduction, vise d’abord à faire en sorte que les spectateurs des œuvres ne soient plus dominés mais qu’ils puissent être pleinement acteurs de leur expérience face à des formes subversives. Cet ouvrage, qui ne revendique nullement l’exhaustivité mais plutôt des choix personnels, s’organise en quatre chapitres chronologiques qui couvrent le siècle dernier, chacun étant centré sur une ou plusieurs personnalités marquantes. 

Un des grands mérites du livre est d’essayer de mettre l’accent sur la dimension collective du travail artistique, qu’il s’agisse du duo Claude Cahun/Marcel Moore, de Michel Journiac, ou des échanges fructueux entre Lynda Benglis et Robert Morris. Alfonsi s’attache ainsi à mettre en échec le récit canonique de l’histoire de l’art qui braque le projecteur sur des figures individuelles d’artistes. Dans le dernier chapitre, passionnant, elle se penche ainsi sur la crise du sida, au tournant des années 1990, ayant conduit à la création de divers groupes activistes. L’un d’entre eux, Akimbo, collectif anonyme sans porte- parole, fondé par des militants du premier groupe états-unien ACT UP à la fin des années 1980, est plus particulièrement étudié. Il s’est illustré dans la diffusion d’affiches ou de cartes postales dénonçant le moralisme ambiant concernant les malades du sida, à travers une efficacité visuelle des plus irrévérencieuses. De la même manière, les réflexions qu’elle développe sur le caractère modeste de l’activité curatoriale de Lucy Lippard, promouvant l’abstraction excentrique sans formuler le désir d’attacher son nom à un courant clairement défini, sont réjouissantes. La conclusion générale de l’essai, qui prône le retour de l’érotisation des corps dans l’art selon une perspective militante à l’encontre de l’esthétique relationnelle de Nicolas Bourriaud, accusé d’avoir contribué à la dépolitisation des affects dans l’art, est plutôt convaincante.

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