Anri Sala

If and Only If

Nathalie Desmet
Galerie Chantal Crousel, Paris, du 15 octobre au 24 novembre 2018
If and Only if, Based on Elegy for Solo Viola (1944) by Igor Stravinsky, capture vidéo, 2018. © Anri Sala / ADAGP, Paris (2018) Photo : permission de l’artiste, Galerie Chantal Crousel, Paris & Marian Goodman Gallery, New York
Galerie Chantal Crousel, Paris, du 15 octobre au 24 novembre 2018
[In French]

Larghetto. Lento. L’une des premières choses que l’on perçoit en entrant dans l’exposition d’Anri Sala est le son d’un violon alto qui s’installe tout en lenteur, une lenteur qui semble exagérée. On comprend celle-ci lorsque l’on découvre un escargot posé sur l’archet d’un altiste dans le film If and Only If (2018), le musicien ayant pour consigne d’accompagner son ascension au rythme de l’Élégie pour alto d’Igor Stravinsky. Le dialogue entre l’homme et l’animal suppose une attention aux moindres ralentissements de l’un ou de l’autre. L’escargot devient maitre de la mesure et du temps, freinant le musicien qui finit par étirer la version originale de la partition de cinq à neuf minutes. Par une curieuse transposition, l’écœurement que l’on ressent généralement à imaginer la progression gluante d’un escargot se transforme en une synesthésie plus sensuelle. L’on songe également au mariage de ce dernier avec le cheval dont le crin constitue la mèche de l’archet, protagonistes pouvant créer les conditions d’un nouveau conte merveilleux.

L’animal est aussi l’objet de la série Untitled (Maps/Species) (2018). L’artiste s’est inspiré de planches gravées d’histoire naturelle du 18e siècle pour créer des rapprochements entre des formes animales, majoritairement des poissons, et des cartes de pays comme le Chili, la Croatie ou le Panama. Des analogies étranges se forment, et parfois les territoires aquarellés sont déformés. L’Italie, dont l’artiste aimerait réconcilier le nord et le sud, s’enroule par exemple sur elle-même comme le pavillon d’une oreille. Des territoires géographiques colorés, souvent à peine identifiables, forment une sorte d’écho aux théories médiévales des correspondances entre microcosme et macrocosme. Tout est dans le tout. Ces recherches formelles ne manquent pas d’entrer en résonance avec le durcissement actuel des frontières et redonnent une sorte d’organicité à des territoires de plus en plus figés.

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This article also appears in the issue 95 - Empathy
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